Billet de blog

Mémoire sur le projet d'expansion du parc à résidus miniers de la mine de fer du Lac Bloom

Rodrigue Turgeon

National Program Co-Lead

Environnement et Changement climatique Canada

Section des mines

Division des mines et du traitement

351, boulevard Saint-Joseph, 11e étage

Gatineau QC K1A 0H3

[email protected]

 

OBJET :      MÉMOIRE SUR LE PROJET D’EXPANSION DU PARC À RÉSIDUS MINIERS DE LA MINE DE FER DU LAC BLOOM

 

Par la présente, la Coalition Québec meilleure mine et MiningWatch Canada vous soumettent leur mémoire comprenant nos commentaires et recommandations concernant l’avis de modifications au Règlement sur les effluents des mines de métaux et des mines de diamants pour le projet du lac Bloom.

 

PRÉSENTATION

 

Fondée en 2008, la Coalition Québec meilleure mine (QMM) regroupe une quarantaine d’organismes qui représentent collectivement plus de 300 000 individus de toutes les régions du Québec. La coalition regroupe des organismes citoyens, des organismes environnementaux, des syndicats, des universitaires et des associations de médecins. Depuis plus de 10 ans, la coalition QMM a été au cœur des débats touchant le secteur minier et a contribué à sensibiliser les décideurs publics et un large pan de la société québécoise sur plusieurs enjeux qui touchent ce secteur. La coalition a contribué positivement à redéfinir les politiques publiques dans le secteur minier, notamment la Loi sur les mines, les redevances minières, les garanties financières à la restauration, l’encadrement environnemental, l’acceptabilité sociale, les territoires incompatibles à l’activité minière, de même que sur les positions du Québec concernant les filières minérales de l’uranium et de l’amiante, et plus récemment sur les minéraux critiques et stratégiques. Depuis 2008, les membres de la coalition ont participé à une quinzaine d’évaluations environnementales de projets miniers au Québec, dont neuf enquêtes du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE). Depuis 2014, QMM est un membre actif du Comité consultatif du ministre des Mines du Québec.

 

Fondé en 1999, MiningWatch Canada regroupe aujourd’hui une trentaine d’organismes membres qui représentent, collectivement, plusieurs centaines de milliers d’individus de partout au Canada. Depuis 20 ans, MWC est devenu un acteur incontournable avec plus de 200 enquêtes, interventions, rapports et actions juridiques sur autant de projets miniers à l’échelle nationale et internationale. Environnement, droits humains, droits autochtones, transparence et imputabilité des entreprises—voilà autant d’enjeux qui justifient les interventions de MWC à l’échelle des communautés comme à celle des politiques publiques. MWC est un membre fondateur et actif du comité aviseur de l’Initiative nationale pour les sites miniers orphelins et abandonnés (INMOA-NOAMI, fédéral/provincial), de même que pour le programme national de Neutralisation des eaux de drainage dans l’environnement minier (NEDEM-MEND). MWC a également été membre du comité aviseur du ministre des mines de l’Ontario, de la réforme fédérale sur les évaluations environnementales et de l’enquête nationale de la Commissaire à l’environnement et au développement durable sur l’application du Règlement fédéral sur les effluents des mines de métaux et de diamants au Canada. MWC a participé à une vingtaine d’actions juridiques, dont quatre à la Cour fédérale et à la Cour suprême du Canada en lien avec des enjeux miniers au pays.

 

La Coalition Québec meilleure mine et MiningWatch Canada participent depuis des années aux consultations provinciales et fédérales portant sur les enjeux miniers de la mine de Lac Bloom. Étant donné la forte proximité des questions traitées par Environnement et Changements climatiques Canada (ECCC)  avec le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), nous invitons la Division des mines et du traitement à prendre connaissance du mémoire que nous avons soumis conjointement en novembre 2020 devant le BAPE.

 

NOTRE POSITION
 

Le 21 février 2023, nous avons émis un communiqué de presse où nous avons exhorté ECCC à ne pas précipiter de décision dans le présent dossier et à exiger une solution de rechange pour sauver les lacs menacés de devenir des poubelles à déchets miniers. La position que nous défendons dans le présent mémoire est la même.

 

Sans remettre en cause l’importance de la mine du Lac Bloom pour la ville de Fermont et les communautés innues, nous demandons au ministre fédéral de l’environnement Steven Guilbeault de ne pas autoriser la destruction des lacs pour stocker des résidus et stériles miniers à Fermont, tel que proposé par Minerai de fer Québec (MFQ). Nous demandons plutôt au gouvernement fédéral d’exiger la mise en place d’une solution de rechange qui minimise l’empreinte environnementale en épargnant les lacs menacés. Nous demandons également que la décision du fédéral soit suspendue le temps qu’une demande d’accès à l’information déposée par la Fondation Rivières et cruciale pour le dossier soit traitée par le MELCCFP.

 

Nous condamnons que la consultation se penche sur le plan compensatoire sur la perte éventuelle de l’habitat du poisson alors que la Commission d’enquête du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) estimait il y a deux ans que MFQ pouvait et devrait développer une solution de rechange permettant d’éviter la destruction des lacs.

 

Nous appelons ECCC à ne pas céder devant l’argument économique du promoteur qui justifie son plan de ne pas remblayer la fosse. Tout projet minier devrait remettre dans la fosse ses déchets miniers, conformément au principe inscrit dans la Loi sur les mines à l’article 232.3.

 

Lors de son lancement en 2008, le projet devait être relativement d’une petite dimension. À coup de décrets et de promesses non tenues qu’il n’y aurait pas d’agrandissements additionnels, les promoteurs passés et actuel ont développé une méga-mine visant l’extraction de 16 000 000 tonnes de minerai de fer par an sans procéder à une évaluation globale des impacts du projet. Une telle croissance réalisée sans planification ni consultations adéquates préalables a permis au promoteur de générer désormais des centaines de millions de tonnes de déchets miniers qui le poussent maintenant à vouloir sacrifier huit lacs pour les entreposer. Les analyses réalisées dans le cadre du BAPE ont démontré que le potentiel minéral que cherche à préserver le promoteur n’a pas été quantifié dans un rapport technique officiel. Ces réserves potentielles seraient par ailleurs issues de gisements dont la teneur est relativement faible, comparativement au gisement principal, et leur rentabilité s’appuierait sur des prévisions économiques peu conservatrices.

 

Le Ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) du Québec a depuis émis un avis statuant que le promoteur n’a pas à établir un plan de minage à long terme dans lequel la rentabilité du potentiel minéral situé sous la fosse serait démontrée. Cet avis a fortement encouragé le Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les Changements climatiques à autoriser la destruction des lacs contre l’avis du BAPE. Pourtant, le MRNF refuse de dévoiler les fondements justificatifs de l’avis qu’il a émis, et ce, en dépit d’une demande d’accès à l’information lui ayant été adressée le 25 novembre 2022 par Fondation Rivières. Ces informations sont néanmoins déterminantes pour que ECCC et la population consultée se prononcent sur le bien-fondé des solutions de rechange et même des plans compensatoires proposés par le promoteur. D’où la demande de suspendre la décision d’ECCC le temps de recevoir ces informations.

Au soutien de nos demandes, rappelons que :

 

  • La décision du gouvernement du Québec de sacrifier les lacs a été prise contre l’avis du BAPE –  Dans son rapport, « la commission d’enquête est d’avis que l’initiateur n’a pas fait la démonstration que les solutions retenues pour la gestion des rejets miniers sont celles qui minimisent les impacts sur les milieux humides et hydriques [...]. En conséquence, la commission recommande que le projet ne soit pas autorisé tel que présenté. »

 

  • Il n’y a pas d’acceptabilité sociale pour la destruction des lacs et milieux naturels pour entreposer des déchets miniers – Un récent sondage Léger indique que près de neuf personnes sur 10 au Québec (89%) se disent en faveur d’« interdire le rejet de déchets miniers dans tout lac, rivière ou milieu écologique sensible ».

 

  • Des milliers de personnes demandent à Québec de renverser sa décision et d’adopter un règlement pour interdire la destruction de lacs par déversement de déchets miniers – À ce jour, 4243 personnes ont signé une pétition demandant au gouvernement du Québec de révoquer l’autorisation accordée à MFQ de détruire huit lacs pour y déverser ses déchets miniers et d’adopter un règlement interdisant clairement cette pratique. La pétition est une initiative des organismes Eau Secours et de la Coalition Québec meilleure mine et demeure ouverte aux signatures.

 


NOS RECOMMANDATIONS

 

  1. Refuser la demande du promoteur de sacrifier des lacs pour l’entreposage de ses déchets miniers;

 

  1. Exiger du promoteur qu’il développe et applique une solution de rechange à l’entreposage de ses déchets miniers ne sacrifiant aucun lac, de même que des scénarios sérieux de remblaiement des fosses afin de limiter au maximum l’impact de l’entreposage de ces déchets hors de ces fosses.

 

 

En vous remerciant à l’avance de l’attention et de la diligence que vous accorderez à notre mémoire, nous vous assurons de notre pleine et entière collaboration pour toute information complémentaire.

 


Salutations cordiales,

 

 

 

Me Rodrigue Turgeon, J.D., M.S.V.D.

 

Coalition Québec meilleure mine, Porte-parole

870, av. De Salaberry, bureau 207, Québec, Québec, G1R 2T9 | www.quebecmeilleuremine.org

 

MiningWatch Canada, Coresponsable du programme national

4, Florence Street, suite 210, Ottawa, Ontario, K2P 0W7 | www.miningwatch.ca

 

Mémoire MWC-QMM Consultation fédérale Lac Bloom